C'est l'effet papillon... Petites causes, grandes conséquences...

12/2008
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FINANcité Magazine N°12

Auteur(s): 

Editeur: 

Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)

Type de document: 

Comment la crise survenue aux États-Unis a-t-elle un impact aussi considérable sur notre économie?

Prenez un pays où les emplois sont de plus en plus précaires, et un marché du crédit complètement dérégulé, où tout est permis, même et surtout des « prêts rapaces », que l’on va refiler en masse aux consommateurs nsolvables, en les appâtant : « vous aussi, vous pouvez devenir propriétaire. Il ne faut pas de capital de départ, le taux d’intérêt n’est que de 2 % les deux premières années, il est variable ensuite, mais soyez sans crainte, en cas de pépin vous ferez une bonne affaire en revendant votre logement, les prix sont à la hausse. D’ailleurs, tout le monde fait comme vous et les autorités vous y encouragent ». Et bien, puisque tout le monde est d’accord... Les consommateurs insolvables signent. 

L’institution prêteuse se débarrasse aussitôt de la responsabilité d’encaisser à l’avenir les remboursements de ces créances douteuses en les titrisant (cf. glossaire). Une fois ces titres (papiers commerciaux « adossés » à des actifs... qui sont en fait des créances) vendus, l’institution prêteuse peut retirer les créances titrisées de son bilan. Elle peut alors réduire le volume des réserves qu’elle est tenue de constituer, et utiliser les capitaux libérés pour prêter à nouveau.

Mais qui donc a acheté ces créances titrisées ? Des courtiers les ont revendues à de gros investisseurs : banques, fonds de pension, assureurs, partout dans le monde. Il faut dire que ces titres avaient tout pour plaire : avantages fiscaux, intérêts juteux, possibilité d’être revendus ou joués en Bourse. Ils ont aussi servi de « levier » pour d’autres emprunts. Ainsi, Lehman Brothers a emprunté, avec ce levier, jusqu’à 30 fois la valeur de son lot de titres adossés à des créances. Quant au risque, des assureurs spécialisés en ont fait leur affaire en couvrant les opérations des spéculateurs. Les agences de notation, payées par les émetteurs de titres, étaient de connivence.

Le destin d’une bulle : éclater !

Mais il y a des limites à la hausse des prix de l’immobilier. Quand les « subprimes» (cf. glossaire) deviennent des
« surprimes » impayables, une masse croissante de consommateurs insolvables ne remboursent plus leurs emprunts. Leurs biens se retrouvent tous sur le marché, et du coup, l’offre étant plus forte que la demande, la valeur de ces actifs s’écroule. Les organismes prêteurs ne peuvent plus se rembourser par la vente des maisons car celles-ci ne valent plus rien.

Les institutions financières tombent à court de liquidités, elles ne peuvent plus rembourser leurs épargnants, ni emprunter à d’autres banques qui connaissent le même problème ou ne souhaitent pas, en ces temps difficiles,
prêter à des organismes en difficulté. Quant à celles qui avaient racheté ces titres toxiques, elles se retrouvent avec des titres qui ne valent pratiquement plus rien et qu’elles ne peuvent plus utiliser comme garantie pour emprunter à d’autres. C’est alors que les États sont appelés à la rescousse...

Glossaire

  • Prime : prix ou mensualité minimale, à payer pour une hypothèque ou une assurance. Aux USA, le secteur «prime» désigne les emprunteurs considérés comme solvables.
  • Subprime : l’emprunteur qui n’est pas « prime » n’est pas tenu de prouver sa solvabilité, il n’est donc pas fiable. Les Américains rechignent à admettre que la plupart des emprunteurs « subprime » sont des pauvres. Ils préfèrent l’idée que leur situation précaire est accidentelle. La rentabilité des crédits subprime n’est assurée que par la hausse des prix, le gage étant le bien acquis. Tant que celui-ci peut être revendu plus cher, tout va bien...
  • Alt -A : les emprunteurs Alt-A se situent entre ces deux catégories, « prime » et « subprime ».
  • Bulle : surévaluation des prix dans un secteur. Quand la bulle (immobilière, internet, boursière) éclate, les prix dégringolent.
  • Produits dérivés : contrats dont la valeur dépend de celle d’un actif ou d’un indice sous-jacent : contrats à terme d’instruments financiers « futures », contrats d’échanges de taux d’intérêt (swaps), options.
  • Produits structurés : produits financiers combinant des placements sûrs à des placements plus risqués (ex SICAV).
  • Titrisation : transformation d’un énorme paquet de créances (des milliers de prêts individuels), en petites tranches égales pour en faire des titres financiers, vendus sous des formes diverses, ex. les ABS.
  • ABS « Asset-backed securities » ou « asset-backed Commercial Papers » : papiers commerciaux adossés à des actifs ou plus exactement, à des créances. « Adossé » est une trouvaille linguistique pour éviter d’utiliser le mot « garanti », car la relation entre le titre et l’actif en question est éloignée.
  • Equities : le pluriel de « equity » désigne des fonds, capitaux propres, un capital d’actions, ou des actions cotées en Bourse. Sont-elles équitables, rien n’est moins sûr ! Même si le terme choisi pourrait le faire penser...
  • Secur ities : le pluriel de « security » désigne soit une caution, une garantie, soit une valeur, un titre. Que le titre soit une garantie de sécurité, rien n’est moins sûr ! Même si le terme choisi... (refrain connu)
  • Futures : Le pluriel de « future » désigne des marchandises achetées à terme, (c’est-à-dire plus tard mais au prix fixé au moment de la transaction) ou le marché à terme.
  • Predatory lending : prêt rapace, usurier. Ainsi, la technique « bait and switch » (appâter et déconnecter) consiste à promettre, puis à faire signer quelque chose qui ne correspond pas du tout à la promesse...
  • Credit crunch : restrictions dans l’octroi de crédits, du fait de la crise bancaire.
  • Hedge funds : fonds « de couverture », en réalité ce sont des fonds spéculatifs.

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