En bref
- Fin 2010, 4 millions de familles américaines auront perdu leur logement.
- En cause, des crédits octroyés sans conditions.
La crise financière de 2007-2008 a trouvé son origine dans les crédits immobiliers subprimes aux États-Unis(1). De quoi s'agit-il ? Les banques et assurances classent leurs clients en nonprimes, primes et subprimes selon les risques estimés de défaillance de l’emprunteur. La catégorie des subprimes regroupe les petits salariés, voire les chômeurs, soit les emprunteurs les plus potentiellement défaillants. Des institutions financières de moins en moins regardantes leur ont donc proposé des crédits avec un taux d’intérêt très élevé, de 4 à 5 points supérieur au taux normal. Ces prêts ont connu un grand succès, en particulier lorsque les taux d’intérêt de base étaient très faibles. Mais, à partir de 2005, ces taux de base sont rapidement montés, pour atteindre 5,25 % à la mi-2006, et de nombreux ménages emprunteurs ont alors connu des difficultés pour rembourser leurs mensualités en hausse : près de 1,2 million de prêts immobiliers ont fait défaut en 2006, soit une augmentation de 42 % par rapport à 2005, avec, bien sûr, pour conséquence immédiate et dramatique la mise en vente des logements, mais aussi la perte de valeur des obligations émises sur base de ces crédits, entraînant la crise financière que l'on a connue (2).
Très cher toit
Depuis l'éclatement de la bulle des titres subprimes, 3,3 millions de logements ont fait l'objet d'une saisie en 2008, et 3,9 en 2009. Cette année, le chiffre devrait dépasser les 4 mil-lions, malgré les mesures de l'Administration Obama qui ont permis à 500 000 propriétaires de renégocier leur emprunt. Après un délai de 22 mois en moyenne, à la demande de l'organisme de crédit qui n'est plus remboursé, le shérif du comté procède à l'expulsion des membres du foyer concerné. En 2008-2009, 2,2 millions de personnes se sont retrouvées à la rue ; 1,2 million de personnes supplémentaires pourraient gonfler les statistiques d'ici à la fin de cette année (3).
Souvent, les gouvernements favorisent les propriétaires par des exemptions de taxe ou des aides à l'emprunt afin de faciliter l'accession à la propriété. Depuis l'enfance, on nous assène qu'il est malin d'être propriétaire. Le Belge n'a-t-il d'ailleurs pas une brique dans le ventre ? Et ne dit-on pas que plus on possède, plus on gagne d'argent ? Un des meilleurs vecteurs de cette vérité universellement admise est le Monopoly, où, en jouant, on peut rêver
d'acheter des rues entières.
Bernard Bayot
1. Voir la vidéo "le B.A-BA des subrpimes" sur rue89.com, également disponible sur www.financite.be
2. Bernard Bayot, « La bulle des pauvres », dans FINANcité Magazine n° 7, septembre 2007.
3. Sylvain Cypel, « Une affaire saisissante », dans Le Monde, 13 octobre 2010.