On les surnomme les « zinzins », les « investisseurs institutionnels » captent ensemble une part astronomique de l’épargne des citoyen∙ne∙s. Mais qui sont-ils ?
Sur l’échiquier de la finance, les fous sont rois. Banques, fonds de pension, compagnies d’assurances, Hedges funds et autres organismes de placements collectifs (Sicav, …) peuvent souvent se vanter de posséder des actifs cumulés qui dépassent allégrement le double du produit intérieur brut d’une nation développée. Ils investissent ces montants sur les places boursières, la plupart du temps sous forme de participations au sein des grands groupes internationaux.
En Belgique par exemple, on retrouve dans toutes les entreprises du Bel-20 des noms comme le fonds d’investissement BlackRock, le Vanguard Group ou encore les fonds pétroliers norvégiens. Des « zinzins » précisément.
Les « zinzins » allient des stratégies de positionnement à long-terme, avec une plus grande attention portée sur la gouvernance de l’entreprise et la valorisation des parts actionnariales, et des tactiques d’investissements spéculatifs à court-terme sans intérêt réel pour l’activité financée. En général, ils se contentent d’une faible participation dans une entreprise, assez large pour peser, mais assez faible pour permettre une dissémination large. C’est à eux que l’on doit la déshumanisation de l’actionnariat. Déjà présents dans les années 60, c’est avec la dérégulation et la financiarisation des années 80 que leur rôle s’est accru. Ils assuraient alors un approvisionnement sans fin sur les marchés.
Tous n’opèrent cependant pas selon le même modèle. Le modèle anglo-saxon par exemple porte une attention plus particulière à la rentabilité du capital, l’allemand préfère les obligations d’États, qui sont moins rémunératrices, mais plus sûres.
Une stratégie d’avenir ?
Voilà pour la théorie. Mais ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que, comme toutes les structures financières, leur métier consiste à minimiser les coûts tout en maximisant le profit. Ici, les coûts représentent le retour promis aux déposant∙e∙s, épargnant∙e∙s, assuré∙e∙s ou pensionné∙e∙s qui leur ont confié leur argent. Les profits, eux, se trouvent dans le retour sur les actifs et les dividendes qu’ils perçoivent.
Ainsi lorsqu’un fonds de pension allemand investit dans la dette publique de son pays, ce sont finalement les contribuables qui financent leur propre pension… diminué des dividendes versés aux zinzins. Ce qu’il importe donc de comprendre, c’est que dans une société où l'un des fondements est la propriété privée, l'allocation du capital dans l’économie constitue un choix déterminant pour notre avenir. Les investissements d’aujourd’hui qui sont réalisés par les grands investisseurs dessinent déjà le monde dans lequel nous vivrons demain. Laisser une liberté si importante aux « zinzins », c’est accepter qu’ils opèrent des choix à notre place.
Que nos deniers financent des groupes pétroliers, d’armement, des sociétés qui accaparent les terres, n’est pas une fatalité. L’investissement socialement responsable est en pleine croissance, mais la conscientisation de l’importance du placement de notre épargne constitue aussi un enjeu majeur de notre époque.