
Le GSM devient l'alternative à la banque dans les pays du Sud
3,5 milliards de personnes dans le monde sont exclues des services financiers. Elles sont trop pauvres pour que les banques les acceptent comme clients ou trop distantes de la moindre agence bancaire. Du coup, elles n'ont pas non plus accès au microcrédit qui leur permettrait de lancer une activité professionnelle. À cause de l'éloignement, les frais de gestion de ces clients sont si élevés que les taux d'intérêt liés à leur crédit deviennent exorbitants.
Et si la solution venait d'ailleurs ?
On estime aujourd'hui que 4 milliards d'individus dans le monde ont accès à un GSM. En 2013, ils seront 6 milliards à pouvoir se connecter. D'après The Economist, d’ici dix ans au plus, toute personne qui le souhaite aura accès à un GSM1.
Les possibilités offertes par le GSM sont nombreuses : s’informer sur le cours des prix pour vendre au meilleur moment ; pour les agriculteurs, avoir accès à des bulletins météorologiques et recevoir, des prévisionnistes, des réponses à des questions précises par SMS ; dans le domaine de la santé, le GSM peut servir à envoyer des SMS d’alerte sur le SIDA et des rappels pour prendre des médicaments, il peut servir aussi à établir un diagnostic à distance par le biais de photos envoyées aux médecins par GSM.
La téléphonie mobile permet enfin à de petits entrepreneurs d’exercer une activité sans avoir une boutique fixe. Une personne habitant en milieu rural, loin de toute agence bancaire, peut contracter un microcrédit via un GSM et se faire payer par ses clients par ce même canal. Les taux d'intérêt liés au microcrédit sont considérablement diminués. En même temps, les frais liés à l'ouverture d'une agence sont réduits pour les banques.
Inclusion bancaire des populations rurales les plus isolées, réduction des coûts de transaction pour les clients, suppression de la nécessité de se déplacer à la banque pour effectuer des transactions financières, services bancaires à moindre coût, sécurité, rapidité sont les principaux bénéfices que l’on peut tirer de l’application de la téléphonie mobile au service bancaire.
Le GSM permet aussi les transferts d’argent des migrants sans passer par les voies traditionnelles et chères telles que Western Union.
Fournir des services financiers par le biais des GSM – ce qu'on appelle le mobile banking – est en passe de devenir LA nouvelle source de développement économique et d'inclusion sociale et financière.
Le mobile banking constitue dès lors un véritable outil de développement. La Banque mondiale estime qu'une augmentation de 10 % du nombre de téléphones portables dans les pays en développement entraine une augmentation du PIB par habitant de 0,8 %2.
Deux modèles de mobile banking coexistent aujourd'hui. Dans les deux cas, le client réalise ses opérations financières par l'intermédiaire de son GSM mais, pour récupérer son argent comptant, il devra passer par l’intermédiaire soit d’une banque, soit d'un détaillant de l'opérateur mobile. Dans ce cas, le client possède un compte virtuel, localisé sur le serveur de son opérateur mobile.
Kenya et Afrique du Sud : deux success-stories
WIZZIT a été lancé en 2004 en Afrique du Sud. Il s'agit d'une banque virtuelle, sans succursale physique. Les clients utilisent les SMS pour payer des produits, transférer de l'argent à d'autres détenteurs de comptes WIZZIT ou recharger leur GSM.
Dépôt et retrait d’argent se font auprès des bureaux de poste ou de certains guichets de banque. Pas d’abonnement mensuel, pas de solde minimum et possibilité d’avoir une carte de débit.
Au Kenya, deux opérateurs mobiles (Safaricom et Vodafone) ont lancé M-PESA, un service pour les utilisateurs de GSM à cartes prépayées.
La Commercial Bank of Africa crée un compte virtuel pour les clients ; Safaricom fournit la carte SIM qui permet les transactions financières. Celui qui a reçu un SMS en guise de paiement l'échange chez un agent (typiquement un petit commerçant) contre du cash.
Aujourd'hui, 7 millions de Kenyans utilisent ce service (sur 38 millions d’habitants, dont 18 millions de détenteurs de GSM), transférant près de 2 millions de dollars par jour à travers le système, à raison de 20 dollars en moyenne par transaction.
Ces beaux succès ne doivent pas faire oublier les défis qui attendent encore les opérateurs de mobile banking : identification des besoins réels des utilisateurs (épargne en plus des paiements et transferts) ; solutions innovantes pour lutter contre l'illettrisme des clients qui dès lors ont des difficultés à utiliser les services du mobile banking ; régulation (besoin d’un cadre juridique spécifique pour cette e-monnaie).
Un avenir prometteur
Il y a dix ans, personne n'aurait imaginé l'importance qu'allait prendre le GSM dans nos vies quotidiennes, et encore moins qu'il puisse être utilisé comme moyen d'inclusion financière pour les plus pauvres.
Sans nul doute, le mobile banking a la capacité de révolutionner les services financiers, en permettant l’accès à une large majorité de ceux qui en sont exclus aujourd'hui dans les pays en développement.
Les promesses sont grandes, les obstacles le sont aussi. Gageons que les opérateurs réussiront à les dépasser pour faire du GSM un outil de développement, de croissance et de lutte contre l'exclusion financière dans les pays en développement.
1 The Economist, 29 septembre 2009
2 The Economist, 29 septembre 2009