Un jus de finance pressée s.v.p. !

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15/09/2010
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Ils sont omniprésents, ont un carnet d’adresses bien rempli et auraient le pouvoir de changer les lois. Pourtant, personne ne sait vraiment qui ils sont ni pour qui ils travaillent...

Auteur(s): 

Editeur: 

Réseau Financité, (ex- Réseau Financement Alternatif)

Type de document: 

Ils sont omniprésents, ont un carnet d'adresses bien rempli et auraient le pouvoir de changer les lois. Pourtant, personne ne sait vraiment qui ils sont ni pour qui ils travaillent...

En bref

  • Lobbies de la société civile versus lobbies du secteur privé.
  • Un registre des lobbies existe.
  • La société civile parle de ce registre comme d’un échec.

Aujourd’hui, en moyenne 30 à 40 % de l’ensemble des lois nationales en vigueur au sein des 27 États membres de l’Union européenne sont issues de la législation européenne (1). C’est à la Commission qu’il appartient de proposer et de développer ces nouvelles législations qui seront votées au Parlement européen.

Au fil du temps, la Commission européenne s’est entourée de plus de 1000 groupes d’experts appelés à la conseiller dans l’élaboration des directives. Parmi ceux-ci, 21 groupes la conseillent directement sur la régulation des finances. Neuf de ces comités sont issus de l’industrie financière, huit des États membres, un de la société civile, et un du
corps académique. Mais il reste deux groupes dont la composition n’a toujours pas été divulguée par la Commission (2). Tous ont pour
point commun de faire du lobby, c’est-à-dire de chercher à influencer les législateurs dans leur travail. La Commission européenne, le
Conseil des ministres et le Parlement européen sont leurs cibles privilégiées. Ces lobbyistes accèdent au grade d’expert lorsque la Commission le décide.

L’expertise à sens unique

La Commission choisit des représentants du secteur privé en argumentant que la finance est un domaine qui requiert une expertise particulière, que le secteur bancaire est seul à pouvoir apporter, explique Natacha Cingotti, collaboratrice pour la coalition Alter-EU (Alliance pour la transparence du lobbying et des pratiques d’éthique en Europe). Cette ONG regroupant 160 groupes de la société civile, syndicats et universités combat depuis 2006 l’influence croissante exercée par les lobbyistes du monde des affaires sur les décisions politiques dans l’Union européenne. Elle dénonce ainsi la législation sur la supervision
financière en cours d’adoption : cette législation, initialement prévue pour sortir la population européenne de la crise financière de 2008, a été rédigée par ceux-là mêmes qui sont en grande partie responsables de la crise. Jacques de La Rosière, bras droit du PDG de PNB Paribas est à la tête de ce groupe, accompagné de 7 experts dont 3 viennent du secteur privé (Lehman Brothers, Goldman Sachs, Citigroup).

Qui influence qui ? Avec quels moyens ?

En 2008, sous la pression de la société civile, la Commission européenne décide de lancer un registre censé identifier l’activité des
lobbies. Ce registre (3) classe les inscrits selon quatre catégories : les consultants professionnels et les cabinets d’avocats ;
les lobbyistes internes et les associations commerciales ; les ONG et les think thanks et « A utres ». Deux ans plus tard, la Commission
présente ce registre comme une réussite pour la transparence du secteur. Du côté de la société civile, on parle plutôt d’échec : ce
registre a été créé pour identifier qui influence qui et avec quels moyens. Le problème est qu’il n’est pas obligatoire. Conséquence : très
peu de lobbies l’ont signé. De plus, il n’existe aucun mécanisme de vérification des données contenues, et les dernières informations disponibles remontent pour la plupart à 2008. La Fédération européenne des banques a ainsi déclaré le plafond maximum déclarable, soit
1 million d’euros. Qui nous dit que si le plafond était de 2 millions, elle n’en aurait pas déclaré autant ? La Commission offre la possibilité de porter plainte contre un lobby dont on peut prouver que le budget est excessif. Mais ce mécanisme a pour seul effet d’exclure le lobby poursuivi du registre de la Commission.

1. Haar Kenneth, Vassalos Yiorgos, Rowell Andy, Spinwatch, « B anking on the bankers – regulation and the financial crisis », Bursting the Brussels Bubble, Alter-EU, 2010, p. 88.
2. William Dinan, Spinwatch and Erik Wesselius, « B russels – a lobbying paradise ? », Bursting the Brussels Bubble, Alter-EU, 2010.
3. Le registre et le mécanisme de plainte sont accessibles sur le site de la Commission européenne (http://europa.eu/
lobbyists/interest_representative_registers/index_en.html
.

Les dernières victoires des lobbies industriels

 Aux États-Unis, la réforme du secteur financier votée ce 15 juillet par le sénat aurait pu légitimement être plus musclée a déclaré John Taylor, président de l’organisation National Community Reinvestment Coalition, qui défend les intérêts des citoyens face au lobby bancaire. Tout d’abord, la taxe qui aurait permis de lever 19 milliards de dollars pour garantir un fonds de liquidation a été supprimée. Ensuite, la loi prévoyait initialement que les banques ne puissent plus investir leurs fonds propres dans des marchés à risque. Les banques ont finalement obtenu de pouvoir investir jusqu’à 3 % de leurs fonds propres dans ces activités.

 Aux États-Unis toujours, le puissant lobby des armes, la National Rifle Association, a félicité le 28 juin dernier la Cour suprême pour son choix de limiter les restrictions à la possession des armes à feu. Une aberration pour la Bradly Campaign qui milite à l’inverse pour un durcissement des limitations et selon laquelle plus de 200 millions d’armes à feu sont en circulation pour 300 millions
d’Américains.
 En Europe, les lobbies de l’agro-alimentaire ont remporté le 16 juin dernier la guerre sur les étiquettes. Les députés européens ont ainsi rejeté le code de couleurs vert, orange et rouge qui devait permettre de déterminer si un aliment est plus ou moins sain, code qui avait été préconisé par les associations de médecins et les associations pour la prévention de l’obésité, du cancer et du diabète.

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